Portail océanique
Valeria Barouch, tous droits réservés
Plongez !
Sentinelle invisible à l’orée des bois,
le geai sonne l’alarme de son cri strident.
Je m’assure par le crescendo de ma voix,
si je suis transparente, qu’au moins l’on m’entend.
La surface lisse du lac soudain s’anime,
Pourtant nul navire ne croise à l’horizon.
Je sonde cet élan qui soudain me ranime ;
Tu es le même, alors quelle est la raison ?
Entre les monts, une mer de nuages
Masque la plaine telle l’Atlantide.
Le jour qui se lève est morne et présage,
Je me recouche et deviens Chrysalide.
Valeria Barouch
***
À René Robert
C’est un vieil homme, au sol tombé, gelant à mort.
Un sans-abri seul s’est penché. Trop tard. Risible.
Hors de portée de nos regards la beauté dort :
Ce que nul ne sait voir, seul le voit l’invisible
Noël Bernard
***
Sur la balance
Près de la fenêtre un reflet
On va s’écrire en silence
Souvenirs masqués
*
Le Petit Prince jongle
Entre les roses, les moutons et les avions…
À l’aveugle…
L’essentiel est visible sans modération
Sandy Dard
***
le train
Dans la vitre du train, la montagne s’anime :
Des glaciers, des gorges, des lacs et des villages.
Apparus dans un tunnel, entre deux abîmes :
nos visages comme s’ils étaient paysage.
la mer la nuit
Le temps de pleine lumière lentement passe
finalement, la nuit vient qui efface tout.
Ma vie, comme la mer : je nage à la surface
mais je ne perçois pas ce qu’il y a dessous.
muguet
La terre est nue, on ne voit rien
pourtant le muguet y refleurira.
Mes jours vécus, ce n’est pas rien
mais va savoir ce qu’il en restera
irréversible
Quand on ferme les yeux, tout le visible devient invisible.
On les rouvre mais tout l’invisible ne devient pas visible.
Ne t’imagine pas que toutes les choses sont réversibles
Effacer les traces de mots malheureux n’est guère possible
Marie Derley
***
A Anne-Laure Bonvalot
10 janvier
Les invisibles aux mille couleurs
poudroient sur la latérite en danse
10 janvier
Cet indicible en mille douleurs
foudroie mon être qui s’effrite en transe
Patricia Houéfa Grange
***
Souvenir qui s’efface
L’avion laisse en son sillage
Une cicatrice éphémère.
J’entends encor ton babillage,
Ma tendre et douce passagère.
Toile d’araignée
Dolomède des marais
Tisse un voile entre les joncs.
Tomberas-tu dans mes rêts,
Bel inconnu des Sablons ?
Voix de disparition
La molinie envahit la tourbière,
L’engoulevent rase d’une aile sombre
le marais menacé.
Ici-bas, tout disparaît – éphémère,
la passion, engloutie dans le décombre
d’un amour effacé.
Armelle Grellier-de Calan
***
Traces de pas dans la neige près du banc :
Par l’emplacement, lièvre non convaincu…
Taper quelques lettres noires sur fond blanc
Comme autant d’ombres de mes instants vécus.
Les insectes ne sont plus visibles
Dans son petit jardin de banlieue.
Toujours cette envie irrépressible :
À l’ami mort, il parle, joyeux.
La tête d’un cerf apparaît dans la brume,
Son corps la suit et s’enfonce dans les bois.
De son père, elle saisit l’écrit posthume,
Lisant quelques lignes, elle entend sa voix.
La Lune derrière un léger brouillard
Se devine à peine au-dessus de la ville.
Certains ne voient en lui qu’un homme paillard
Jusqu’à ce qu’il commence à sculpter l’argile.
Olivier Gabriel Humbert
***
On n’écope pas l’océan,
à l’impossible nul n’est tenu.
On voudrait voir et cependant
par l’invisible tout est tenu.
Jean de Kerno
***
Mutine et insomniaque la lune joue à cache-cache
Les nuages complices s’en amusent, font des rimes.
L’homme même sage ne peut retenir sa marche,
Il laisse courir sa vie, étranger au sublime.
Évelyne Ménétrier
***
Au fond de son antre, l’araignée
règne sur les forces invisibles.
Les gens les plus puissants vivent cachés
pour faire accepter l’impossible.
*
Elfes et fées sont invisibles
aux cœurs de cendre et de pierre.
Va au-delà du crédible
pour interpréter la lumière.
*
D’éternelles villes invisibles
hantent nos improbables futurs.
Après l’effondrement prévisible
les hommes habiteront des masures.
Yann Quero
***
On ne voit bien qu’avec le cœur.
L’essentiel est invisible pour les yeux
Antoine de Saint-Exupéry
Ce matin tout est blanc immaculé,
Feuilles putréfiées dissimulées sous la neige.
C’est Noël, joie des enfant non dissimulée.
Je souris, Mamy est partie et mon cœur se désagrège .
Pétards, feux d’artifice c’est la fête.
Dans l’ombre demeurent les sans abris.
Il l’ a quittée, dans son cœur gronde la tempête.
Pas une larme, elle danse, elle chante, quelle supercherie.
Le bateau s’évanouit dans l’horizon,
Vers d’autres côtes il naviguera.
Devenu adulte il a quitté le cocon,
Dans sa chambre subsistera son aura.
La lumière est là, la terre est fertile,
Pourtant mon arbre se meurt.
Belle, intelligente, silhouette juvénile,
Sombre est son âme déjà centenaire.
Le paysage est avalé par le brouillard
Tout renaîtra avec le soleil.
Elle a tiré le rideau , on ne perçoit plus le phare.
Sereine, elle sait que sur les marins il veille.
Sylvia Rosset
***
Au-delà
Les étoiles sont absentes du ciel bleu
Et pourtant bien présentes dans les cieux.
Nos défunts ne nous ont pas quittés,
Ils attendent juste de l’autre côté.
Espoir
Le vent, force invisible,
Fait danser l’océan.
Un espoir invincible
Me porte au gré des courants.
Cycle
Des heures joyeuses, il ne reste rien
Hormis d’impalpables souvenirs.
L’hiver est arrivé mine de rien,
Aucune trace des fleurs à venir.
Souvenirs
Les souvenirs dansent dans ma tête,
Bonbons invisibles du passé.
Ce qui fut ne peut plus être,
Ne reste plus qu’à avancer.
Orage
La chaleur écrasante a blanchi le ciel d’été,
Mais les nuages noirs arrivent, l’orage va éclater.
L’Homme a beau paraître placide dans son tempérament,
À la moindre contrariété, il devient violent.
Amélie Sapin