Photopantoun de Valeria Barouch
Éros protéiforme, insaisissable…
Vos déclinaisons d’Éros ont même retrouvé le chemin de la tradition malaise…
Bonne année 2024 !
Pantun Asmara (Pantouns d’Amour)
Le vent caresse le caroubier,
les graines chantent dans les gousses.
Caresse ardente allume un brasier,
une caresse tendre l’émousse.
Valeria Barouch
***
Dialogue avec Fernando Pessoa
« Au-dessus de la jupe bleue
Il y a une veste rouge ;
Au-dessus de tout ça des yeux
Qui pour moi jamais ne bougent. »
Sur mes joues tous les jours
Après le feu du rasoir une lotion parfumée.
Sur mes lèvres pour toujours
De ton baiser d’adieu un goût d’inachevé.
« Tu as des sandales qui frappent
Sur le sol avec leur talon.
J’aime mieux que la mort m’attrape
Que d’entendre mourir ce son. »
Acacias et sureaux fleurissant à loisir
Librement se répandent leurs fragrances
Ton parfum floral attisant mon désir
Prestement s’évanouit ma conscience
« C’est à Mont-Gros que, sur la plage,
Je te connus, ô mon amour.
Depuis Mont-Gros, curieux présage,
Que j’ai maigri, jour après jour ! »
Pluie et vents, tempête, vagues écumantes
Les marins souquent ferme à bord de la chaloupe !
Peintres et poètes, muses amies amantes
L’été est un paradis sur la plage de la Garoupe !
« Sur la grève, légère et brève,
La vague nous apprend l’oubli.
Brève et légère, sur la grève »
Ta joie efface ma mélancolie.
Michel Betting
***
La mésange, casaque noire, tête bêche, cueille
la graine de l’arbrisseau gelé, maigre pitance…
Quand mon ange à boire, vers sa coupe m’accueille
sans peine à boisseaux je l’aime.. Bombance !
Nicolas Brap
***
Brise languide en mai
éveille les désirs.
Quand soudain tu te tais
s’éveille mon plaisir.
Armelle de Calan
***
Le ciel se pare d’une teinte bleu de Chine,
les sons de la ville s’épointent, pas après pas…
Baignée par la mousse de l’heure bleue divine,
de soie vêtue je l’attends, tout son corps se tendra.
Nathalie Dhénin
***
La Coulemelle, triptyque
La coulemelle est comestible
si son anneau coulisse.
De ton corps concupiscible
j’attends les prémices.
Voici que son anneau coulisse
le long de la tige drue…
En attente des prémices
je m’étends, belle et nue.
Le long de la tige drue
l’anneau s’en va s’en vient…
Je m’étends belle et nue
et toi, tu me rejoins.
Frédérique Duriez
Spirelix d’Olivier-Gabriel Humbert
(cliquer pour agrandir)
***
Il y a du marbre sur ta peau,
signe de vie à travers les temps.
Si tu embrasses un jeune crapaud,
ton marbre deviendra excitant.
Ta main sur ta choppe
Dans ma tête développe
Une image hot :
Yeux en joie quand tu la tiens,
Lèvres humides, va et vient …
Ronin Janvier
***
Se découvre au ciel la Rêveuse
écartant les voiles des nuages…
Griffures d’étoiles orageuses
quand nos corps s’ouvrent au passage.
La Lune est tombée sur les Monts,
enfin l’Obscur n’a plus de Maître.
Ta Langue descend — un Démon
incandescent sur tout mon Être.
Feuillages ombrés — de clairs rayons
touchent à peine l’ondée fragile.
Tes yeux sombres et cendrés me sont
des roches, nos peaux de l’argile.
J.M.K.
***
La brume matinale, en un opaque rideau
Dissimule à mes yeux les fleurs encore endormies
Dans la brume de mes songes, émerge ton dos
Ô drap malicieux, tu caches les secrets à demi…
En automne, le vent chante
et les feuilles battent la mesure.
Ton souffle dans mon dos,
et je ne réponds plus de moi.
*
Le pinceau, distique
Le pinceau dépose sur le papier quelques pigments,
transparence de l’aquarelle aux teintes claires.
Je dépose sur votre peau mes caresses très lentement…
Effleurement des doigts le long du corps offert.
Des tons clairs aux plus foncés, l’œuvre se fait chair,
Oh, pinceau recouvre la surface du tableau !
…Et vous imagine aquarelle et mystère…
Vous frissonnez à chaque coup de pinceau,
Arnaud Keller
***
Cœur vagabond
Vagabonde, la lune se cache
parmi les nuages tels des masques.
Je te vois, ton sourire m’attache,
tes baisers sont de douces attaques.
Danse d’Éros
L’œil du monde, astre en décomposition,
se disperse dans le crépuscule rouge.
La belle danseuse, rouge d’excitation,
promet le paradis à chaque position.
Jean-Valery Martineau
***
La puissance des flammes
s’étend, atteint la canopée.
Érigée tel un oriflamme,
son ardeur est digne d’une épopée.
Éros, d’un unique baiser,
ressuscite sa bien-aimée.
Faire battre mon cœur fut aisé,
déjà l’amour y avait germé.
Une faille silencieuse se creuse en Islande :
prudence, un volcan sommeille.
Son corps endormi n’est qu’offrande,
il y pose ses lèvres : ardente, elle s’éveille.
Sylvia Rosset
***
L’horizon s’embrase de teintes acidulées,
Sur le charme repose Douce Colombe.
À tes charmes mon âme succombe,
Déraison enflamme le cœur, ma dulcinée.
La flèche du chasseur de la biche
ravit le cœur.
Je lèche mes blessures et pleurniche,
mon cœur se meurt.
Fontaine aux reflets hypnotiques,
je ne boirai plus de ton eau.
Belle Hélène aux charmes magiques,
je ne goûterai plus ta peau.
Valériane San Felice
***
Danse, comme tu le fais si bien,
dieu de l’amour et du désir.
Pense, toi mon ange gardien,
protège ma vie et mes envies.
Sarah Zacharie
Pantun Budi (Pantouns de Sagesse)
Quelles amours enchanteresses
quand Éros envoie ses flèches !
Hélas, s’enfuit ma jeunesse,
le corps et le cœur s’assèchent…
Armelle de Calan
***
L’homme plus sage qu’on ne le pense
cherche un cœur sur un tas d’os.
La vie humaine se balance
entre Eros et Thanatos.
Tirant ses flèches vers un cœur en fer blanc,
Cupidon est-il plus sournois qu’Eros ?
Tant de faux serments venant d’un amant,
qui dit ‘aimer’ peut-il être aussi rosse ?
Yann Quero
***
Esméralda séduite par Phoebus,
Thanatos emporte Quasimodo.
Miroir aux alouettes et vils laïus,
trop souvent hélas, nous rendent sots.
Sylvia Rosset
***
Éros vient, son arc à la main,
pour transpercer plus de victimes ;
La Mort tient sa faux pour demain
nous entraîner jusque l’abîme.
Suzanne Secret
Pantun lucu (Pantouns humoristiques)
La pomme d’or, au lieu de plaisir,
causa pourPâris bien des tracas.
Quand mille nuits je t’aurai fait languir
je tomberai dans tes bras … ou pas.
Valeria Barouch
***
Un paon du jour passait janvier
sous une corde de bois vert.
Amants d’un jour, le dieu ailé
les a tractés jusqu’à l’hiver.
*
Sur des contrepèteries de Robert Desnos
Hommage à Rrose Sélavy*
Rrose Sélavy voudrait bien savoir si l’amour, cette colle à mouches, rend plus dures les molles couches.
Colle à bois
Colle à mouches.
À moi ! À moi !
Rros louche.
Les orages ont pu passer sur Rrose Sélavy, c’est sans rage qu’elle atteint l’âge des oranges.
Oranges gonflées
poireau potager.
Rros engagé :
verticalité.**
**Ce pantoun est suivi d’un carré blanc
Épitaphe :
Ne tourmentez plus Rrose Sélavy, car mon génie est énigme. Caron ne le déchiffre pas.
L’immortel Rros –
à califourchon
couché sur sa rosse ?
Je crois qu’il est rond.
Devise de Rrose Sélavy
Plus que poli pour être honnête
Plus que poète pour être honni.
Couve le poète
l’œuf de Sévaly.
Au couveur qui pète
L’œuf éclot pourri.
Nul ne connaîtrait la magie des boules
sans la bougie des mâles.
Manger des quenelles
en chambre d’hôtel.
Bougies de Noël
Rroseaux pluriels.
De cirrhose du foie meurt la foi du désir de Rrose.
Si l’Rros c’est la vie
alors la vie c’est rosse.
Si tu es Sélavy,
je suis rhinocéros !
*
Rrose Sélavy connaît bien le marchand du sel.
Hors Duchamp Rrose
pour trois fois rien pose.
Ah la belle chose :
Rrose en hypnose !
*Sur les contrepets et autres calembours de Robert Desnos (1923)
sur le personnage de Rrose Sélavy, créé par Marcel Duchamp
Jean de Kerno
***
Et ron et ron petit patapon
le patou surveille ses moutons.
Éros, éros, vie de patachon,
ma patronne parle de séduction !…
Orville